Les glaciers fondaient. Ils n’avaient plus que de petites langues amincies dans les cannelures des roches ; la montagne couverte de cascades grondait comme un tambour. Il n’y avait plus de petits ruisseaux mais des torrents musclés aux reins terribles et qui portaient des glaçons et des rochers, bondissaient, luisants et tout fumants d’ écume plus haut que les sapins, minaient leurs rives profondes, emportaient des lambeaux de forêts. Les eaux, les roches, les glaces, les ossements d’arbres se tordaient en grosses branches d’acier à travers le pays et se déversaient en mugissant dans l’immense fleuve. Lui portait ses larges eaux si loin de son lit ordinaire qu’il ne bougeait presque plus, encombré de fermes désertes, de bosquets, de tertres, de lignes de peupliers ; perdus dans des replis de collines, il s’engraissait lentement à plat. Des bords lointains on apercevait seulement là-bas au milieu le moutonnement du grand courant.Depuis longtemps les houldres avaient quitté la falaise de l’arche pour aller crier le printemps partout.
Le Chant du monde, Giono, folio, p.261
Acrylique et encre, 35×45 Peut être bien pour l’expo à venir sur le thème : « quel avenir pour hier » 🙂



Qui pouvait avoir une aussi belle et sensorielle écriture ?
A la fin de ce merveilleux texte, le nom de Giono apparaissait.
J’ai compris mon ravissement à la lecture ancienne de tous ces livres.
Ma fidélité à mon émotion passée m’a rassuré.
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